Fondre
- Érotique
Il était une fois un rendez-vous dans un hôtel classique. J’ai tenté d’être un homme méconnaissable, beau-coup moins solennel, bazardant le costard-cravate qu’elle détestait. Je lui accordais des vœux sans me soucier du reste, persuader d’un moment atypique. Ce qui m’animait parfois lors de ces rencontres était la pos-sibilité de jouer avec ma proie. Isoler ces personnes qui avaient tant envie de moi était devenu une nécessi-té pour le « gars » derrière le rôle et souvent, je méprisais à tous, d’être superficiel, d’être des morceaux de chairs désirantes et faibles. J’entreprenais les séances de séduction totale juste avant de les punir, laissant leurs carcasses enflammées dans l’attente que je revienne un jour vers elles, finir ce que nous avions com-mencé.
Mais elle… Elle semble réticente, mal à l’aise de se tenir là sous le jugement de mon regard. Elle évite soigneusement de se confronter à ça, même si je perçois son soulagement de m’affronter enfin et de se dévoiler comme l’imperfection qu’elle dit incarner. Elle me trouve « illusoire », ça ne l’intéresse pas, je ne l’impressionne pas, au contraire, ma carrure l’effraie. Dès que j’avance, elle repère quelque chose à tripoter ou à lorgner longuement. Je suppose qu’elle s’efforce de se détendre sans y parvenir. Par la suite, tourné un moment vers la porte de la chambre, je crois qu’elle veut prendre la fuite.
— Comment tu me notes ? Est-ce que tu me vois sous tout ce gras ?
— Arrête-toi ! Tu as déjà énormément de gages pour tes insolences…
Je hais sa façon de faire, de se dévaloriser en permanence, c’est assez désespérant. Ma patience, pourtant avec elle est illimitée. Pardonnant ses divagations, j’observe Nina, ses tiques d’hésitations, sa robe courte qui révèle les formes de son postérieur que j’ai besoin de dévorer.
— Ne me laisse pas le choix, sinon je m’envole.
— T’as envie de partir, là ?
Elle a reculé vers moi jusqu’à se positionner contre la sculpture figée que je suis devenue à attendre qu’elle se décide. Son dos épouse mon torse et ses fesses rondes se pressent sur ma gaule. Je la trouve pénible… Je la sais charmante… Bandante. Elle a retroussé le pan de son habit fin pour me dévoiler son incroyable cul de garce. J’avais promis de lui faire autant de bien que je pouvais…
— Ce n’est pas de l’insolence. Regarde de quoi je suis faite. De boue et de regrets…
Elle exhibe un bout de ses hanches, je remarque ses doigts se crisper sur le tissu de son vêtement, elle avait cessé de respirer.
— J’espère que tu acceptes les imperfections, j’en suis bourré.
— Moi aussi.
Je suis chamboulé par son derrière qui aimante ma queue, je m’imagine déjà l’esquinter pour l’apaiser et enfin accueillir son chant de plaisir, lui faire oublier ce qui lui bouffe l’égo.
— Regarde-moi !
— Non !
— Foutue garce !
Je plaque brutalement mes mains sur ses hanches parce qu’elle s’agite, elle ondule du bassin d’une manière clairement provocante. J’ai l’impression de me retrouver dans la même pièce avec deux personnes dis-tinctes.
— Si tu ne libères pas ce qu’il y a en moi, je pars !
Je la sens frémir, elle se frotte contre la braguette de mon pantalon, j’appuie fort pour empreindre ses gestes, elle s’arrête souvent pour gémir et trembler un peu. Je remarque bientôt les traces blanches sur le synthétique. J’ai le désir lourd, mais elle m’avait fait promettre de ne pas la baiser de suite alors que je crève d’envie de la mordre, de me figer en elle avant de me comporter comme un animal.
Nina se tourne enfin vers moi. Elle engouffre ses doigts entre ses jambes, je vois disparaître sa manucure entre ses cuisses pour extirper sa glaire, son foutu filament qu’elle se fourre dans la bouche en me plantant son courage dans mes yeux.
— Comment fait-on ? Je veux nous découvrir sans masques.
— Je n’en porte pas là…
— C’est terrifiant, je ne sais pas si celui que tu trimballes à présent n’en est pas un.
— Je n’en ai pas, tu devrais me croire… L’insolence peut se payer au prix fort.
Elle possède un sourire adorable et des feux qui s’allument sous ses paupières. Mais elle ne se laisse tou-jours pas aller, je sens ses muscles se raidir dès que je feins une caresse. Ma bosse s’étend vers elle, frustrée par ce jeu qui n’en est certainement pas pour elle… Bien que le doute soit permis.
— Quelle partie de moi veux-tu dévorer ?
— Ton âme… Tout…
Elle observe mes articulations avec un appétit féroce, elle dit les adorer particulièrement lorsque les veines apparaissent gorgées de tensions, les enflant, rendant leurs bourrelées absolument sexy pour elle. Sa bouche s’étire et ses mains cueillent les miennes pour les porter à son visage. Elle est complètement béate d’admiration devant mes doigts, les respire à pleins poumons et se frotte la figure avec leurs bouts. Puis avec une délicatesse assez intolérable, sa langue s’enroule autour du majeur… De l’index… De l’annulaire… Elle me suce avec tellement de plaisir que ma queue est au supplice, jalouse d’être mise de côté, mais je la regarde faire avec application, attirée par ses amandes immenses qui me percent de leurs pupilles sombres. Je veux l’embrasser, mais c’est à elle de se servir de moi. Elle connait mon nom et mon histoire, elle apprécie chez moi la bête affamée, le Minotaure dominé, l’homme inquiétant, l’enfant qui se terre. Ma prestance, mes attitudes de dandy charmant ne présentent aucun intérêt sans tout ça.
— Je viens m’égarer… Il faut parfois que je m’abîme pour me sentir vivante. Je ne peux pas rester sur un chemin tracé non ? Les sentiers sont tellement plus affolants. Certains d’entre nous ont besoin de se perdre pour oublier ces rôles sans importance qui nous troublent, qui nous ennuient.
Elle déboutonne ma chemise, ses lèvres caressant les miennes entre deux phrases. Elle me déshabille et je me laisse faire « par curiosité » parce que ça me plaît. Elle m’admire comme un tableau, recule un peu pour mieux étudier l’ensemble. Elle s’attarde sur ma virilité carminée qui se tend presque fumante de désir, mes couilles s’alourdissent, le tronc sursaute provocant les sanglots de mon gland.
— Tu es tellement obscène. Regarde-toi ! Ton corps est ciselé pour le vice, tu en as fait un temple fier, une vitrine putassière pour tes « fans ». Moi ce que je souhaite, c’est que tu l’utilises cette force pour m’étouffer, que je puisse te mordre et connaître le vertige de ton sang.
À son tour, elle s’effeuille, mais garde contre elle sa robe pour me dissimuler son ventre. La lady se couche sur le lit, je crois que je dois entrer en scène. C’est ce qu’elle me réclame depuis des jours ; que je m’allonge sur elle, qu’elle disparaisse sous ma masse. Soit ! Je m’avance… J’apparais au-dessus d’elle, je m’imprègne de sa crainte de moineau. Elle a peur… Elle respire plus fort, ne sachant pas comment elle va gérer ça. Je mate ses courbes, ses hanches, je rêve de la retourner et d’admirer son cul, mais ses yeux hurle, j’entends l’appel de sa douleur, priant le Minotaure qu’elle distingue en moi, de l’achever… L’inonder me plaît mieux. J’ai la bite en feu, dressé vers son ouverture chaude, mais je prends le temps, tout mon temps pour enfiler un capuchon. Elle frémit et je trouve ça merveilleusement beau d’observer les soubresauts de son être tandis qu’elle crispe les doigts, les empêchant d’aller papillonner près des zones sensibles. Lorsque je me couche sur elle, le cri étranglé qu’elle pousse me donne des envies féroces. Nina ondule déjà sous moi, c’est une vague timide, cherchant à positionner ma queue entre ses lèvres pour sentir son appui sur toute la moiteur de son alizée. Le petit bouton est écrasé et ça la rend vibrante. Elle me délivre avec ses mains, appliquant ses caresses sur mon corps pour me remodeler à sa guise, apprivoiser cette morphologie qu’elle ne comprend pas, qu’elle pense disproportionnée. Nina semble fascinée par cette confiance que je lui accorde, à m’ouvrir comme personne. Je ne peux m’empêcher de glisser contre son ventre, cette attente me frustre… Elle aussi. Nina a ses yeux immenses posés sur moi, qu’elle ferme à moitié redoutant l’approche de son typhon intérieure. Je me délecte de sa déroute lorsque ses ongles s’enfoncent en moi. Sa bouche happe un de mes tétons pour contenir sa folie, je ne peux pas me retenir plus et je fais ramper mon membre vernissé contre sa chatte. Elle mouillait avide, je pourrais entrer si facilement… J’ai cette pré-sence incandescente coincée entre moi et ce lit immense qui flambe de sa jouissance.
— T’es trop beau pour être honnête. C’est comme ça que tu attires à toi les âmes sans phares. J’ai envie de tout déchiqueter pour regarder sous ta peau… Putain ! Baise-moi !
— Non…
Je veux l’entendre piailler encore, faire monter sa tension. Elle commence à s’agiter, frétillant sous la créa-ture qu’elle désire que je sois. Je pèse contre elle, adorant sentir ses mouvements pour tenter de m’échapper, ceux pour s’accrocher. Les coups de dents qu’elle distribue sont provoqués par la frustration que je réserve ma queue en dehors d’elle : elle enrage.
— J’aimerais m’oublier… Oublier que je joue un rôle. Une interprétation sans importance, tout est tellement fade, tu sais, il n’y a que ça qui me touche encore, qui me fait croire à l’exaltation de mes sens. Je suis vivante dans ce cercueil de chairs, sous toi, sous eux. On m’a appris à marcher droit, alors que per-sonne ne tourne rond autour de moi. J’effectuais des pirouettes avant qu’on ne me disloque, j’ai besoin en permanence de retrouver cette impression de tournis, d’ivresse, avant la chute de toute innocence. L’abandon total de soi, je le trouve dans la fascination de nos envies. Je veux me paumer sans béquille, sans canne, savoir maîtriser un jour mon chaos intérieur…
Elle agrippe ma main pour en ceindre son cou, je commence à serrer presque automatiquement. Lorsque je constate ses yeux révulsés et sa bouche qui s’entrouvre pour peindre son excitation, aussitôt, je plonge mon épée dans sa brisure souillée par son propre foutre. Pris de vertiges, je me fiche bien au fond de son creux, sans cesser de la fouiller malgré ses spasmes. Elle couine en véritable chienne, ça réveille ma brutalité, alors je l’embrasse. Je pose mes lèvres pour ressentir ses « putain » qu’elle assène et je la manipule à l’extrême étirant ses cuisses pour l’éclore davantage. Posséder enfin son petit cul dans mes paumes pleines et me branler comme un sagouin dans sa chatte est un plaisir sans équivalence. Je deviens vulgaire, tandis qu’elle s’empale plus férocement sur mon engin.
— Ta bite de velours qui me ramène à la vie… Putain ce régal… Baise-moi fort, plus fort.
C’est une chose inattendue qui se dilue en moi, celle de la violence de nos corps qui s’entrechoquent et cherchent à se fracturer à tout prix. Je me noie. Je la broie sous mes vagues et mes houles, ses hoquets se perdent dans mes baisers étouffés ; une tempête qui déclenche un affolement chez elle et moi-même. Nos regards sont flous, nos sexes confondus, nous tentons de nous canaliser et de retrouver une tendresse qui semble nous échapper. Elle cherche à lutter contre cette force qui libère d’un coup une bestialité que je ne me connaissais pas. Je lui crache à la gueule tandis qu’elle me rend la pareille, oscillant entre larmes et rire, me posant sa main devant la bouche ; j’y cloue mes dents, ses griffes plantées dans mon dos.
Je me fane dans son jardin humide sans avoir la notion du temps, son ciel ouvert sur une nuit éternelle où les pleurs de ma jouissance se confondent aux siens. Dans son ventre, je me suis arrimé un bon moment avant que ses chuchotements me raniment. Apaisée, elle se cache contre mon buste et me raconte, haletante, les rêves foudroyés de la petite fille qui se planque depuis toujours dans l’écho de son monde.
- Autrice Paracelsia Le Saigné
- Crédits Photo Zap Ann